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Domiciliation des sociétés.




Lecture  dans le nouveau règlement et obligations , à la lumière de la loi. La loi n°89-17, publié au Bulletin Officiel n°6788 (version française) du 20/06/2019.
 
Le législateur vient enfin de combler un vide juridique concernant la domiciliation des entreprises.
 
Jusqu’alors seule une instruction datant de 2003 (note n°1923) du Ministère de la Justice fixait la durée maximale de la domiciliation des sociétés à six mois et prévoyait comme sanction, la dissolution de ladite société sauf si elle concluait un bail commercial avant l’expiration de cette durée.
 
Dans la pratique, cette instruction n’ayant aucune valeur juridique, aucune administration que ce soit l’administration fiscale ou encore la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale, ne considérait ces sociétés domiciliées comme dissoutes.
 
En effet, par application de la loi, seuls les associés ou encore un tribunal peuvent décider de la dissolution d’une société et ce, dans le respect d’un processus légal et/ou statutaire visant notamment à désintéresser les créanciers de la société et à répartir, le cas échéant, le boni de liquidation entre les associés ou actionnaires.
 
La loi n°89-17, promulguée par le dahir n° 1-18-110 du 9 janvier 2019 publiée au Bulletin Officiel n° 6745 (version arabe) du 21/01/2019 et au Bulletin Officiel n°6788 (version française) du 20/06/2019 modifiant et complétant le code de commerce, réglemente désormais la domiciliation des sociétés.
 
Cette loi a ainsi institué plusieurs nouveaux articles dans le code de commerce, les articles 544-1 à 544-11 qui réglementent l’activité de domiciliation et fixent les obligations de chacune des parties à ce contrat.
 
En quoi consiste donc la domiciliation des sociétés (I), quelles sont les obligations des parties prenantes (II) et enfin quelles sont les sanctions applicables (III).
 
I – Qu’est-ce que la domiciliation ?
 
Juridiquement, la domiciliation de l’entreprise est le contrat par lequel une personne physique ou morale, dénommée domiciliataire, met le siège de son entreprise ou son siège social à la disposition d’une autre personne physique ou morale, dénommée domiciliée pour y établir le siège de son entreprise ou son siège social.
 
La loi exige ainsi l’établissement d’un contrat écrit, lequel doit être établi pour une durée déterminée renouvelable et selon un modèle fixé par voie réglementaire.
 
Il est interdit à toute personne physique ou morale d’établir son siège dans plus d’un lieu de domiciliation, de même qu’il est interdit pour une société ayant son siège social au Maroc d’être domiciliée.
 
Toutefois, les sociétés et leurs filiales qui installent leurs sièges dans le même local dont l’une est propriétaire, ne sont pas tenues de conclure entre elles un contrat de domiciliation ; un simple accord écrit de la société propriétaire suffit.
 
En d’autres termes, la domiciliation atteste de l’adresse fiscale et juridique de la société. Elle ne doit pas être confondue avec le lieu d’exercice, qui lui peut être différent. Cette adresse administrative (adresse de domiciliation) doit figurer sur tous les documents de l’entreprise (papier à en-tête, devis, factures, plaquettes de communication…).
 
La domiciliation ne cesse qu’en cas de transfert du siège social ou en cas de dissolution de la société. Ainsi, la domiciliation sera renouvelée tant qu’il n’y a pas radiation de la taxe professionnelle et radiation de l’adresse du domiciliataire du registre du commerce du domicilié.
 
Toutefois, la société domiciliaire peut toujours résilier le contrat de domiciliation dans le respect des dispositions contractuelles prévues à cet effet (notamment en cas de manquement à l’obligation de paiement si la domiciliation n’est pas gratuite) et aviser l’administration des impôts, le tribunal de commerce, le trésorier et la douane de la résiliation dudit contrat de domiciliation.
 
II- Les obligations des parties prenantes
 
2.1 – A la charge du domiciliataire
 
2.1.1-Tout d’abord, pour exercer l’activité de domiciliataire, il faut avoir préalablement effectué une déclaration contre récépissé auprès de l’administration compétente, le contenu de cette déclaration devant être fixé par voie réglementaire.
 
Le domiciliataire doit ainsi remplir un certain nombre de conditions pour pouvoir exercer cette activité, il doit notamment :
 
- Justifier de la propriété ou d’un bail commercial des locaux mis à disposition ;
- Etre en situation régulière vis-à-vis de l’administration fiscale ;
- N’avoir pas fait l’objet d’une décision définitive prononçant à son encontre la déchéance commerciale ou d’une condamnation depuis moins de 5 ans précédant la date de déclaration pour certains crimes ou délits comme l’infraction de blanchiment de capitaux  ou actes de terrorisme.
 
Les personnes physiques ou morales exerçant déjà l’activité de domiciliation avant la présente loi, disposent d’un délai d’un an à compter de la publication au Bulletin Officiel des textes réglementaires pour régulariser leur situation.
 
2.1.2 - La loi a ensuite prévu un certain nombre d’obligations contraignantes à la charge de tout domiciliataire, elles sont énumérées à l’article 544-4 du code de commerce.
 
Ainsi par exemple, le domiciliataire doit :
 
1-S’assurer de l’identité de la personne domiciliée, et ce en demandant une copie d’une pièce d’identité de la personne physique domiciliée ou un certificat d’inscription au registre du commerce ou toutes autres documents délivrés par l’autorité administrative compétente, pouvant déterminer l’identité de la personne domiciliée ;
 
2-Conserver les documents relatifs à l’activité de l’entreprise domiciliée et l’obligation de les mettre à jour;
 
3-Conserver les documents pouvant déterminer l’identité de la personne domiciliée pendant au moins cinq ans après la fin des relations de domiciliation ;
 
4-Tenir un dossier sur chaque personne domiciliée contenant les documents d’authentification relatifs, pour ce qui est des personnes physiques, à leurs adresses personnelles, numéros de leurs téléphones et numéros de leurs cartes d’identité, ainsi que leurs emails ; et pour ce qui est des personnes morales, les documents attestant les adresses, numéros de téléphone et cartes d’identité de leurs dirigeants ainsi que leurs emails. Ce dossier comprend aussi des documents relatifs à tous les locaux de l’activité des entreprises domiciliées et le lieu de conservation des documents comptables s’ils ne sont pas conservés chez le domiciliataire ;
 
5-S’assurer que le domicilié est bien immatriculé au registre du commerce dans un délai de trois mois à compter de la date de la conclusion du contrat de domiciliation, lorsque cette immatriculation est obligatoire en vertu des textes législatifs et réglementaires en vigueur ;
 
6-Communiquer aux services chargés des impôts et la Trésorerie Générale du Royaume, et le cas échéant, l’Administration des Douanes, la liste des personnes domiciliées pendant l’année écoulée et ce, avant la date du 31 janvier de chaque année ;
 
7-Notifier aux services des impôts et la Trésorerie Générale du Royaume, et le cas échéant, l’Administration des Douanes, dans un délai ne dépassant pas quinze jours de la date de sa réception des lettres recommandées envoyées par les services fiscaux aux personnes domiciliées, de l’impossibilité de les leur délivrer ;
 
8-Informer le greffier auprès du tribunal compétent et les services des impôts et la Trésorerie Générale du Royaume, et le cas échéant, l’Administration des Douanes, de la fin du contrat de domiciliation ou de sa résiliation et ce, dans un délai d’un mois à compter de la date de cessation du contrat ;
 
En cas de non-respect des obligations 4 à 8 prévues ci-dessus et sans préjudice des autres sanctions ci-dessous, le domiciliataire sera tenu solidairement responsable du paiement des impôts et des taxes dus en raison de l’activité exercée par le domicilié.
 
2.2- A la charge du domicilié
 
L’article 544-6 du code de commerce prévoit, quant à lui, les obligations à la charge du domicilié.  Il doit notamment :
 
1-Faire une déclaration auprès du domiciliataire :
 
- s’il s’agit d’une personne physique, de tout changement de son adresse personnelle et d’activité,
- et s’il s’agit d’une personne morale, de tout changement de sa forme juridique, sa dénomination et objet ainsi que les noms, adresses des dirigeants et les personnes disposant de délégation de la part du domicilié pour contracter en son nom avec le domiciliataire et lui délivrer les documents y afférents ;
 
2-Informer le greffier du tribunal compétent, les services des impôts, la Trésorerie Générale du Royaume, et le cas échéant, l’Administration des Douanes, de l’arrêt de la domiciliation et ce, dans un délai d’un mois à compter de la date de la cessation du contrat ;
 
3-Donner une procuration acceptée par le domiciliataire pour réceptionner toutes les notifications en son nom ;
 
4-Mentionner sa qualité de domicilié chez le domiciliataire dans toutes ses factures, lettres, bons de commande, tarifs, prospectus et l’ensemble des documents commerciaux destinés aux tiers.
 
III- Les sanctions et amendes
 
Les sanctions et amendes sont prévues par les articles 544-9 à 544-11 du code de commerce.
 
Est ainsi puni d’une amende de 10.000 à 20.000 dirhams, toute personne physique ou morale ayant exercé l’activité de domiciliation sans avoir effectué la déclaration auprès de l’administration compétente.
 
Est également puni d’une amende de 10.000 à 20.000 dirhams, tout domiciliaire ayant enfreint les dispositions de la nouvelle loi prévoyant les conditions d’exercice de l’activité de domiciliation ainsi que ses obligations (point 2.1 ci-dessus).
 
Est enfin puni d’une amende de 5.000 à 10.000 dirhams, tout domicilié ayant enfreint les dispositions de la nouvelle loi prévoyant ses obligations (point 2.2 ci-dessus)

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